TERRE DES OURS

Kamtchatka, ton univers impitoyable

Des ours à l'extrême est de la Russie (©Paramount Pictures)
Des ours à l'extrême est de la Russie (©Paramount Pictures)

Le Kamtchatka, c'est à l'extrême, extrême pointe est de la Russie: plus à l'est, c'est le Pacifique; plus au sud, c'est le Japon.
C'est ''là-bas, tout au bout du monde'' –comme dit la voix off de Marion Cotillard, seul élément un peu glamour du film– que se situe le documentaire animalier de Guillaume Vincent sur les ours bruns.
Là-bas, dans cette ''terre perdue, loin des hommes, loin de tout'', vivent 15.000 à 20.000 ours, dans un décor de 300 volcans dont une trentaine en activité.
Les ours ne vivent pas en société, ni en couple. C'est la mère qui s'occupe de ses petits pendant trois ans. Guillaume Vincent, spécialiste des documentaires animaliers pour la télévision depuis une vingtaine d'années, raconte l'histoire d'un ours de quatre ans, à peine sorti de l'enfance, qui doit trouver sa place dans ce monde impitoyable.
Pendant les huit mois d'hiver, les ours perdent un quart de leur poids. Pendant les quatre mois qui restent –et qui constituent l'essentiel du film–, il va falloir se remplumer: prendre en moyenne 200 kilos, en avalant 50 saumons par jour.
On suit donc les aventures de cet ours de quatre ans, de sa soeur –ils se filent de sacrés mandales, quand même–, des rivaux, des mâles dominateurs pas vraiment partisans de la théorie du genre (3 mètres de haut, 900 kilos, jusqu'à 30 ans de carrière), des femelles dévouées à leur progéniture et prêtes à en découdre.
Quand, après bien des kilomètres et un certain ennui, les ours se retrouvent en nombre au bord du lac Kourile pour chasser le saumon, le film atteint son comble de tension, d'agressivité, de concurrence. Un peu longuet quand même, le voyage. Un peu répétitif, la pêche au saumon. Un peu tendue, l'ambiance.
Mais on n'est pas là pour rigoler. A ce moment du film, c'est sûr, on n'a plus envie d'acheter d'ourson en peluche pour la naissance du petit dernier. Les petits ressemblent autant à des hyènes qu'à des oursons.
Mais le film a le gros avantage, contrairement à un Disney ou à un documentaire trop scénarisé (façon Nicolas Vanier ou Luc Jacquet), de ne pas véhiculer de message faussement écolo-humaniste –ni de forcer le spectateur à avoir de l'empathie pour les personnages principaux, ces bêtes sauvages qui ne demandent qu'à le rester.
Ça tombe bien: ces ours-là, on n'a aucune tendresse pour eux. La 3D (c'est, dit Guillaume Vincent, le premier documentaire animalier dans ce format), comme souvent dans les plans larges, réduit les ours à de petites figurines perdues dans un décor de carte postale en relief. On les regarde d'un oeil un peu lointain.
Quant à vos prochaines vacances, pas sûr que vous les passiez au Kamtchatka. Bon, c'est vous qui voyez.
Jean-Michel Comte

LA PHRASE
''Une terre perdue, loin des hommes, loin de tout'' (La voix off de Marion Cotillard, décrivant les lieux).

TERRE DES OURS
(France, 1h27)
Réalisation: Guillaume Vincent
(Documentaire)
(Sortie le 26 février 2014)