QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT

L'enfant, l'arbre et le deuil

Dans le film, un arbre géant parle avec un ado de 12 ans pour l'aider à surmonter ses peurs (©Metropolitan FilmExport).
Dans le film, un arbre géant parle avec un ado de 12 ans pour l'aider à surmonter ses peurs (©Metropolitan FilmExport).

Il y a certes des façons plus gaies, plus divertissantes, plus légères de commencer la nouvelle année. Mais le film QUELQUES MINUTES APRES MINUIT, mélodrame sur un garçon de 12 ans qui apprend à surmonter la maladie de sa mère, a suffisamment de qualités pour qu'on s'y intéresse.

"L'histoire commence avec un garçon trop âgé pour être un enfant et trop jeune pour être un homme. Et un cauchemar", dit la voix off, au début du film. Le garçon s'appelle Conor (Lewis MacDougall, très convaincant), c'est le souffre-douleur de ses camarades d'école et, à la maison, il a du mal à supporter le cancer de sa mère (Felicity Jones), la sévérité de sa grand-mère (Sigourney Weaver) et l'absence de son père (Toby Kebbell) qui vit séparé de sa mère.

Alors Conor, pour fuir ce quotidien sombre, se réfugie dans le dessin et chaque nuit, quelques minutes après minuit (à 0h07 exactement), il s’échappe dans un monde imaginaire peuplé de créatures extraordinaires. Parmi celles-ci, un mystérieux arbre géant qui bouge et parle (voix de Liam Neeson dans la version originale), sorte de monstre effrayant mais amical, qui dialogue avec lui: "Je viens te chercher. Je vais te raconter trois histoires. Et toi tu m'en raconteras une quatrième. Ce sera ta vérité, ton cauchemar…" Ce cauchemar va lui permettre d'apprendre le courage et la force d'affronter la vérité, et de faire face au chagrin et au deuil…

C'est le réalisateur espagnol Juan Antonio Bayona qui a adapté un best-seller de l'écrivain anglo-américain Patrick Ness, paru en 2011 et traduit dans 40 langues. Le livre est lui-même tiré d'une idée originale et en partie autobiographique de Siobhan Dowd, romancière britannique décédée des suites d’un cancer peu de temps après s'y être attelée.

En découvrant ce livre, Bayona dit avoir retrouvé des thèmes abordés dans ses deux premiers films, L'ORPHELINAT (2007) et THE IMPOSSIBLE (2012): "des personnages se retrouvent dans une situation anxiogène, avec le spectre de la mort qui se profile à l’horizon. J’ai trouvé cette histoire d’une force et d’une importance telles que j’ai voulu en faire un film, une aventure dans laquelle tout le monde puisse se reconnaître".

C'est aussi, pour lui, le moyen de compléter sa trilogie sur la relation mère-fils. Dans L'ORPHELINAT, une jeune femme revient dans l'orphelinat de son enfance avec son mari et son fils de sept ans, tandis que THE IMPOSSIBLE (avec Naomi Watts et Ewan McGregor) raconte l'histoire vraie d'une famille confrontée au tsunami qui a frappé l'Asie du Sud-Est en 2004. Par ces deux films le réalisateur espagnol a impressionné Hollywood au point de se voir confié, pour son quatrième film, la suite de JURASSIC WORLD, dont la sortie est prévue en juin 2018.

Dans QUELQUES MINUTES APRES MINUIT, il montre à nouveau de belles qualités de réalisateur, dans une histoire sombre et émouvante où se mêlent songe et réalité. C'est effrayant et triste, pas vraiment pour les adolescents, même si la fin est porteuse d'espoir. Bien que le réalisateur s'en défende, c'est très mélodramatique: faire pleurer le spectateur avec les angoisses d'un garçon de 12 ans dont la mère est en train de mourir d'un cancer peut paraître un peu facile, voire indigne. Mais ceux qui se laisseront entraîner dans cette histoire forte et bouleversante –et en partie autobiographique– laisseront couler leurs larmes sans honte ni retenue.

Jean-Michel Comte

 

LA PHRASE

"On n'aime pas ce qu'on ne comprend pas" (la mère, à son fils, alors qu'ils regardent ensemble King Kong).

 

QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT

("A Monster Calls") (États-Unis/Espagne, 1h48)

Réalisation: Juan Antonio Bayona

Avec Lewis MacDougall, Sigourney Weaver, Felicity Jones

(Sortie le 4 janvier 2017)