Le coeur des femmes
Les comédies entre potes, façon VINCENT, FRANÇOIS, PAUL ET LES AUTRES ou LE COEUR DES HOMMES, où l'on parle foot et gonzesses, elle en avait ras le bol. L'actrice Audrey Dana passe derrière la
caméra pour montrer que les bandes de filles, ça sait aussi rire et faire rire.
Dans un film choral et féminin, elle réunit 11 actrices dans 11 rôles de femmes variées, dont certaines vont se rencontrer et d'autres non.
Les histoires se mêlent pendant ''les 28 premiers jours du printemps'', à Paris. Vingt-huit jours, le temps d'un cycle menstruel, particularité physique des êtres humains de sexe féminin dont il
est beaucoup question dans le film.
Audrey Dana commence son histoire en y faisant ouvertement allusion. La période d'essai d'Alice Belaïdi dans l'entreprise de Vanessa Paradis se termine dans 28 jours. ''T'es belle ou c'est moi
qui ovule?'', demande Audrey Dana à Laetitia Casta. Et le film, bien sûr, se termine par un éparpillement de petites étoiles rouges qui scintillent sur l'écran façon confettis. C'est donc ce qui
se passe sous les jupes des filles.
Le film devait s'appeler HOMOSAPIENNES, mais Audrey Dana a eu peur qu'on prenne ça pour un documentaire, et le film a finalement pris un titre qui rappelle la chanson d'Alain Souchon. Avec un
clin d'oeil sur l'affiche: les 11 actrices sont en pantalon.
Elles se nomment –par ordre alphabétique– Isabelle Adjani, Alice Belaïdi, Laetitia Casta, Audrey Dana, Julie Ferrier, Audrey Fleurot, Marina Hands, Géraldine Nakache, Vanessa Paradis, Alice
Taglioni et Sylvie Testud.
Il y a la femme qui refuse d'admettre sa ménopause, la femme autoritaire qui a fait de sa jeune assistante son esclave, la femme qui a peur de séduire, la femme qui est cocue sans le savoir, la
femme qui veut sortir de sa vie de mère et d'épouse, la femme qui aime les femmes, la femme qui aime les hommes mariés, la femme qui a des tics et ne peut se libérer sexuellement, etc.
Dans ce multi-portrait, difficile d'éviter les clichés, malgré la volonté affirmée d'Audrey Dana. Dans ce domaine, les personnages de Marina Hands (femme trompée), Vanessa Paradis (femme
autoritaire), Géraldine Nakache (femme-mère-épouse) et même Audrey Dana (femme amoureuse) sont lourdement caricaturaux –et les actrices souvent mal dirigées.
Laetitia Casta, Julie Ferrier ou Audrey Fleurot s'en tirent un peu mieux. Et les hommes, relégués au rang de potiches –c'est de bonne guerre, un prêté pour un rendu– n'évitent pas eux non plus le
déjà-vu, entre maris odieux et princes charmants potentiels (Marc Lavoine, Pascal Elbé).
Audrey Dana et sa complice Murielle Magellan (qui a cosigné le scénario et les dialogues) expliquent avoir rencontré
et interrogé des dizaines de femmes (''des inconnues, et des femmes qui marquent notre époque, comme des grandes romancières, des créatrices de lingerie, des patronnes de gros canards
féminins, des grands reporters, des journalistes, des médecins, des gynécologues, des dermatologues'') pour dresser un panel divers des Françaises (on va dire: des Parisiennes)
d'aujourd'hui.
Les spectatrices riront sans doute plus volontiers que les spectateurs. C'est un film culotté (sans jeu de mot), mais pas entièrement réussi, où les renversements de situations se voient venir à
dix kilomètres à la ronde et où les mots d'auteur(e) tombent parfois à plat (''Les femmes c'est comme les yaourts: quand elles arrivent à la date de péremption, elles gonflent, elles se tendent
et elles explosent'').
On aurait voulu que ce soit léger, sans que cet adjectif soit associé à ''féminin'', par peur du sexisme. Woody Allen, par exemple. Une jolie scène finale, au Trocadéro, y parvient.
Mais, la plupart du temps, c'est souvent lourd, sous les jupes des filles. Sans que cet adjectif soit associé à ''masculin'', par peur du sexisme.
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
''Les feux d'artifice, c'est comme le clitoris, ça sert uniquement à faire plaisir'' (Marina Hands).
SOUS LES JUPES DES FILLES
(France, 1h56)
Réalisation: Audrey Dana
Avec Isabelle Adjani, Laetitia Casta, Vanessa Paradis
(Sortie le 4 juin 2014)