MALAVITA

Besson l'Américain

You 'talking to me? (©EuropaCorp)
You 'talking to me? (©EuropaCorp)

Luc Besson joue les Américains et rend hommage aux films sur la mafia: Robert De Niro est la vedette de son nouveau film, truffé d'allusions à Martin Scorsese. Mais ça se passe en Normandie et c'est l'adaptation d'un roman de l'écrivain français Tonino Benacquista, MALAVITA.
Giovanni Manzoni (De Niro), ancien caïd new-yorkais, est depuis six ans sous la protection du FBI pour avoir témoigné contre ses ex-collègues de la mafia italienne de Brooklyn. Ceux-ci ont mis des tueurs à ses trousses pour se venger, et lui et sa famille doivent déménager, souvent, et se cacher, toujours.
Après la Côte d'Azur, ils débarquent dans un petit village de Normandie, sous l'identité de la famille Blake. Manzoni est avec sa femme (Michelle Pfeiffer), leur fille de 17 ans et leur fils de 14 ans.
Il s'agit de s'intégrer comme une famille américaine normale, de faire profil bas, de ne pas se faire remarquer. En face de leur villa, trois agents du FBI, un chef (Tommy Lee Jones) et deux adjoints, les surveillent pour les protéger.
Mais rester passif n'est pas naturel, chez les Manzoni-Blake. Quand le père a besoin d'un plombier ou a des problèmes avec le maire, quand la mère est l'objet de moqueries à la supérette du village, quand les enfants doivent se défendre contre la xénophobie de leurs petits camarades de lycée, les bonnes vieilles habitudes reprennent vite le dessus...
''L’essentiel, c’était de garder un ton léger: même si l’histoire est assez sombre, c’est avant tout une comédie'', explique Luc Besson. ''On a donc essayé de trouver le juste équilibre. Et la meilleure façon de ne pas être prétentieux, c’est de tourner le film avec humour. Tous les personnages se prennent au sérieux mais on a constamment le sourire aux lèvres parce qu’ils sont cinglés!''
L'intention est louable, même si parfois l'humour ne fait pas dans la dentelle. Tout comme les scènes d'action, où ça défouraille à tout va, façon LEON ou NIKITA.
Robert De Niro, plus patriarche que jamais, en fait des tonnes et Michelle Pfeiffer n'est pas en reste dans le genre. Mais Luc Besson s'est visiblement délecté de tourner avec ce duo prestigieux, et l'apport de Tommy Lee Jones donne un peu de légèreté à l'ensemble (notamment dans ses dialogues avec De Niro).
Pour l'hommage aux films de mafia, et pour le suspense final, MALAVITA est globalement agréable à voir, même si l'on nage de bout en bout dans des invraisemblances qu'un film souligne davantage qu'un livre, quels qu'ils soient.
Pour l'humour et le second degré, en revanche, c'est moins réussi. Il y a des scènes savoureuses, mais d'autres ratées parce que les gags sont téléphonés ou tombent à plat. Dommage car Besson, fou de cinéma, est constamment tourné vers son public plutôt que vers son nombril –et c'est pour ça que les critiques et les intellos le boudent souvent.
Pourtant, dans MALAVITA, il n'est pas avare dans l'ironie. ''Le piège aurait été de se moquer uniquement des Français ou uniquement des Américains: j’ai essayé de tourner tout le monde en dérision'', dit-il. Mais l'équilibre n'y est pas tout à fait, et l'on voit que le réalisateur penche d'un côté, sans pour autant rendre sympathiques les personnages qu'on a parfois du mal à trouver crédibles.
Jean-Michel Comte

LA PHRASE
''A part notre débarquement en 44, elle est connue pour quoi, la Normandie?'' (le fils de De Niro, au début du film).

MALAVITA
(France, 1h41)
Réalisation: Luc Besson
Avec Robert De Niro, Michelle Pfeiffer, Tommy Lee Jones
(Sortie le 23 octobre 2013)