Dire que Fanny Ardant est plus séduisante à 60 ans qu'à 30 serait certes exagéré. On se souvient de LA FEMME D'À CÔTÉ (1981) ou de VIVEMENT DIMANCHE (1983). Mais quand même...

A 64 ans, elle irradie de son charme le film LES BEAUX JOURS, belle histoire d'une passion filmée avec délicatesse et justesse par Marion Vernoux, dont c'est le sixième film après notamment LOVE, ETC. (1996, avec Charlotte Gainsbourg et Yvan Attal) ou REINES D'UN JOUR (2001, avec Karin Viard).

Dentiste fraîchement retraitée, mariée depuis de nombreuses années à un autre dentiste (Patrick Chesnais), mère de deux filles et trois fois grand-mère, Caroline a reçu pour son anniversaire une inscription à un club d'activités pour seniors: poterie, yoga et expression corporelle, cours d'oenologie et d'informatique.

C'est une ''maison de retraite'', renâcle-t-elle. Non c'est ''un club'', dit son mari. Elle accepte finalement ce ''forfait découverte'' offert par ses filles, en traînant les pieds. Et, de fait, les activités ne lui plaisent pas trop, au début.

Mais il faut bien faire quelque chose de son temps. Elle s'habitue à ses nouveaux compagnons de jeu (Jean-François Stevenin, Fanny Cottençon, Catherine Lachens, Marie Rivière). Et surtout, sans y prendre garde, noue des liens avec le jeune prof d'informatique (Laurent Lafitte). Il a l'âge de ses filles, mais elle n'a plus l'âge de s'en soucier...

La vieillesse? ''Tout ce qui est inéluctable est excitant'', dit Fanny Ardant, formidable de naturel dans ce film où elle s'est fait teindre en blonde et porte des jeans pour la première fois de sa vie –et ça lui va bien. Le film, tourné en bord de mer à Dunkerque, est tiré d'un roman de Fanny Chesnel, Une jeune fille aux cheveux blancs.

Il ne surfe pas sur la mode des ''cougars'' qui séduisent des hommes plus jeunes, c'est juste un joli portrait de femme à un moment clé de sa vie, et une belle histoire de passion soudaine et irraisonnée mais qui fait du bien.

Laurent Lafitte, 39 ans, petit bouc et sourire charmeur, amoureux des femmes sans leur demander leur date de naissance, est impeccable dans ce rôle de gentil séducteur qui ne demande rien d'autre que de prendre un peu de plaisir et d'en donner. Et le personnage de Caroline va sauter sur l'occasion. ''La vie est comme une forêt équatoriale, il y a des lianes qui passent, on les saisit, ou pas'', dit Fanny Ardant, qui a eu trois filles de trois pères différents (dont François Truffaut).

Une passion, à 60 ans, OK. Mais il s'agit aussi, pour Marion Vernoux, de ''parler du couple. Qu'est-ce qui fait que l'on reste ou non ensemble? Comment relance-t-on les dés? C'est un immense mystère, plus que le coup de foudre. Cette capacité à continuer, ou pas...'', dit-elle.

A ce sujet, le couple formé par Fanny Ardant et Patrick Chesnais est décrit avec finesse, tout en nuances, sans claquements de portes. Lui s'aperçoit qu'elle a pris un amant, lui dit qu'il ne cherchera pas à la reconquérir, feint l'indifférence mais est réellement atteint.

Dans le rôle, Patrick Chesnais, 67 ans, sans doute l'un des meilleurs acteurs français, est épatant –comme toujours. ''J'aime ces acteurs dont on se dit quand ils jouent qu'ils pensent un peu à autre chose'', dit de lui Marion Vernoux. ''Patrick possède cette forme de présence-absence qui convenait bien pour incarner ce mari, dont on se demande s'il a compris que sa femme a un amant, s'il s'en fiche. Ce n'est pas de la désinvolture mais du mystère''.

Jean-Michel Comte

LA PHRASE

''Du temps, j'en ai. Je n'ai que ça, même''. (Fanny Ardant à Laurent Lafitte).

LES BEAUX JOURS

(France, 1h34)

Réalisation: Marion Vernoux

Avec Fanny Ardant, Laurent Lafitte, Patrick Chesnais

(Sortie le 19 juin 2013)