LA VOLEUSE DE LIVRES

Les mots qui font du bien

Sophie Nélisse, Emma Watson et Geoffrey Rush prennent le train (©20th Century Fox)
Sophie Nélisse, Emma Watson et Geoffrey Rush prennent le train (©20th Century Fox)

Non, tous les Allemands n'étaient pas de méchants nazis dans les années 30. Certains cachaient des juifs dans leur cave, d'autres luttaient contre les autodafés de livres ou l'enrôlement de force des jeunes garçons dans les Jeunesses hitlériennes.
Dans LA VOLEUSE DE LIVRES, tiré du best-seller du même nom de l'auteur australien Markus Zusak publié en 2005, les bons sentiments équilibrent les horreurs de la guerre. Avec une fillette d'une dizaine d'années ans qui trouve le salut dans les livres.
Le début du film est triste, et noir. Ou plutôt blanc: dans l'immensité d'un paysage enneigé, un train à vapeur file doucement. A son bord, une mère et ses deux enfants. Le plus jeune, malade, meurt dans ses bras. On l'enterre au village suivant.
On est en Allemagne, en février 1938. Le deuxième enfant, une petite fille nommée Liesel, est adoptée par un couple: Hans, bienveillant et accueillant, et sa femme Rosa, sévère et râleuse.
Liesel a du mal à s'adapter à sa famille d'accueil, et à l'école on se moque d'elle parce qu'elle ne sait pas lire. Alors elle apprend, aidée par Hans, qui lui donne des cours dans la cave.
Peu à peu Liesel se met à lire des livres. D'abord Le manuel du fossoyeur, que les croque-morts ont oublié après avoir enterré son petit frère. Puis un livre qu'elle a sauvé des flammes, subrepticement, lors d'un autodafé. Puis des livres qu'elle va emprunter, secrètement, dans la grande bibliothèque d'un des notables de la ville –au risque de se faire prendre.
Un jour, ses parents adoptifs prennent la décision courageuse et dangereuse de cacher un jeune juif, Max, dans leur cave. Celui-ci ne peut sortir de sa cachette, de peur d'être dénoncé, et reste alité car il est malade. Alors Liesel lui lit des livres, le soir, inlassablement, en rentrant de l'école...
Tourné en partie dans les studios Babelsberg à Berlin, LA VOLEUSE DE LIVRES est le premier film du réalisateur britannique Brian Percival, qui jusqu'à présent a beaucoup travaillé pour la télévision.
Particularité de ce film un peu à l'eau de rose: c'est la Mort, au début et à la fin, qui explique les choses en voix off. Entre les deux, empathie pour les personnages (beaucoup) et dénonciation du nazisme et de la guerre (un peu) se mélangent en proportions inégales, dans un cocktail traditionnel  émotion-humour-suspense, là aussi à doses variées.
Message voulu par le réalisateur: les mots peuvent aussi bien faire le mal (les discours de propagande nazie) que le bien (les livres qui forment le caractère de Liesel et les histoires qu'elle raconte aux autres pour les divertir, les soulager, les aider à supporter la vie).
Dans ce rôle de Liesel, la jeune comédienne québécoise Sophie Nélisse, 13 ans, déjà remarquée dans le film MONSIEUR LAZHAR il y a deux ans, s'en tire plus qu'honorablement.
Elle est aidée par un couple d'acteurs qui ont suivi des parcours différents depuis 1996. Cette année-là, Geoffrey Rush jouait dans SHINE de Scott Hicks (qui allait lui valoir l'Oscar du meilleur acteur) et Emily Watson débutait au cinéma dans BREAKING THE WAVES de Lars von Trier.
Depuis, l'acteur australien a pris de l'ampleur (MOI, PETER SELLERS; les différents PIRATES DES CARAÏBES; LE DISCOURS D'UN ROI), alors que la carrière de l'actrice britannique a été moins spectaculaire (PUNCH-DRUNK LOVE; MOI, PETER SELLERS également; CHEVAL DE GUERRE).
On la revoit donc avec plaisir dans ce film où son personnage évolue vite vers la bonté et la bienveillance, malgré les apparences trompeuses du début.
Jean-Michel Comte

LA PHRASE
''Je ne suis pas prêt. Je veux grandir avant de mourir'' (Rudy, 12 ans, le petit camarade de classe de Liesel, qui ne veut pas qu'on l'engage dans les Jeunesses sportives hitlériennes).

LA VOLEUSE DE LIVRES
(''The Book Thief'') (États-Unis/Allemagne, 2h11)
Réalisation: Brian Percival
Avec Geoffrey Rush, Emily Watson, Sophie Nélisse
(Sortie le 5 février 2014)