À LA MERVEILLE

L'amour est un devoir

Olga Kurylenko et Ben Affleck (©Metropolitan FilmExport)
Olga Kurylenko et Ben Affleck (©Metropolitan FilmExport)

Qu'est-ce qu'il arrive à Terrence Malick? Vénéré par de nombreux cinéphiles, il avait pris l'habitude (ceci explique cela) de se faire rare et secret: cinq films en 38 ans. Ce furent LA BALADE SAUVAGE (1973), LES MOISSONS DU CIEL (1978), LA LIGNE ROUGE (1998), LE NOUVEAU MONDE (2005) et THE TREE OF LIFE (2011) qui obtint la Palme d'or à Cannes.

Et puis le revoilà, deux ans à peine après, avec son nouveau film À LA MERVEILLE. Et depuis, précise le dossier de presse, ''Terrence Malick a écrit et réalisé le drame VOYAGE OF TIME, le drame romantique KNIGHT OF CUPS, avec Christian Bale, Natalie Portman, Cate Blanchett et Teresa Palmer, et un projet encore sans titre avec Christian Bale, Ryan Gosling, Natalie Portman, Cate Blanchett, Michael Mara et Bérénice Marlohe''. Waou!

Dans À LA MERVEILLE, il est question d'amour. Du mystère de l'amour. De la difficulté de faire vivre l'amour au quotidien. Des différentes saisons de l'amour: la passion, la sympathie, le sens du devoir, la chagrin, l'indécision, l'usure. Et de la manière dont chacun aborde cela de manière différente.

Neil (Ben Affleck) et Marina (Olga Kurylenko) se sont connus en France et sont tombés amoureux. Lui l'ingénieur américain, elle l'Ukrainienne mère célibataire d'une gamine de 10 ans. Ils sont allés au Mont Saint-Michel, ''la merveille de l'Occident'', et c'était l'amour fou.

Puis Neil est rentré en Oklahoma, a repris son travail d'inspecteur chargé de la protection de l'environnement, et a amené avec lui Marina et sa fille. Mais le temps creuse son sillon et l'usure s'installe. Marina se sent perdue, isolée, piégée, mal dans sa peau. Elle cherche conseil auprès d'un autre expatrié comme elle, un prêtre catholique nommé Quintana (Javier Bardem). Qui, lui aussi, est assailli par le doute.

Marina et sa fille finissent par quitter Neil et rentrer en Europe. Neil se console avec Jane (Rachel McAdams), une ancienne amie, à laquelle il s'attache de plus en plus. Mais quand il apprend que rien ne va plus pour Marina, il se sent écartelé par les deux femmes de sa vie. L'amour, le devoir, le choix, la compassion, la culpabilité...

À LA MERVEILLE est un beau poème d'amour, parfois abscons, d'une beauté formelle très travaillée. On reconnaît le style Terrence Malick, plus mystique et plus écologiste que jamais, avec des séquences peuplées de grands champs d'herbes et de cultures qui plient sous le vent, avec ou sans chevaux, avec ou sans bisons, avec ou sans êtres humains... Il y a aussi des banlieues riches et des banlieues pauvres, des lotissements tristes, des bébés, des prisons, des vieillards, des oiseaux dans le ciel.

C'est plus facile à suivre (et à comprendre) que THE TREE OF LIFE, c'est plus linéaire, mais parfois tout aussi pompeusement grandiose, avec musique magistrale et pratiquement aucun dialogue et des voix off tout au long du film, comme un effet de style. Dans le genre, on préfèrera celle de Javier Bardem, en prêtre tourmenté par les méandres de la foi et l'amour du prochain, que celle d'Olga Kurylenko, perdue, déçue, mais jamais vaincue par les hésitations de la vie de couple.

Quant à dire que ce film est une ''merveille'', il y a un pas que l'on ne franchira peut-être pas. Ou alors lentement, à y regarder plusieurs fois, comme la marée qui avance autour du Mont Saint-Michel.

Jean-Michel Comte

 

LA PHRASE

''L'amour n'est pas qu'un sentiment. L'amour est un devoir''. (Javier Bardem, dans le rôle d'un prêtre).

 

À LA MERVEILLE

(''To The Wonder'') (Etats-Unis, 1h52)

Réalisation: Terrence Malick

Avec Ben Affleck, Olga Kurylenko, Javier Bardem

(Sortie 6 mars 2013)