Retrouvailles entre JFK et Charles-de-Gaulle
Deux ex se retrouvent assis côte à côte dans un avion pendant sept heures entre New York et Paris: à cette belle idée de scénario, Ludivine Sagnier et Nicolas Bedos donnent vie dans AMOUR ET TURBULENCES, jolie comédie romantique qui n'atteint pas des hauteurs stratosphériques mais tient bien son cap.
Julie est une jeune artiste dont les sculptures n'ont pas beaucoup de succès et qui, après quelques semaines à New York, rentre à Paris dans le but de se marier dans trois jours. Elle est insouciante et gaie mais a décidé de se ranger et d'épouser un homme sérieux, gentil et sans histoires.
Antoine est un jeune avocat amateur de jolies filles, cynique et sûr de lui, qui peut être aussi charmeur que désagréable. Il brûle la vie par les deux bouts, a la réputation d'être incapable de désirer une femme plus de 15 jours, mais se sent parfois seul.
Les voici donc, par le plus grand des hasards cinématographiques, assis l'un à côté de l'autre en classe Affaires d'un vol entre JFK et Charles-de-Gaulle. Après un amour fou, ils se sont séparés trois ans auparavant, dans d'assez mauvais termes. ''On va se faire la gueule pendant tout le voyage?'', demande-t-il. ''On ne se connaît pas'', répond-elle.
Très vite, cependant, le dialogue s'emballe entre eux. Devant leurs voisins de siège, ils évoquent les souvenirs de leur vie commune. Antoine essaye de reconquérir cette Julie qui paraît inflexible: mission impossible?...
Le réalisateur Alexandre Castagnetti, dont c'est le premier film au cinéma (après deux téléfilms), a choisi une mise en scène originale dans laquelle il alterne les deux visions qu'ont Antoine et Julie de leur vie commune, il confronte leurs souvenirs en flash-back qui sont parfois de fausses pistes pour le spectateur.
Avec ses scénaristes, ''on s'est posé cette question dès le début de l'écriture'', explique-t-il. ''Allions-nous prendre parti? Et si oui, pour lui ou pour elle? La majorité des comédies romantiques le font. Mais il existe des exceptions, dont l'un des films qu'on avait en tête en travaillant: QUAND HARRY RENCONTRE SALLY. On avait envie du même type de comédie romantique: très dialoguée et construite sur un affrontement entre deux caractères très forts, avec le point de vue successif de l'un et de l'autre''.
Pour sortir du huis clos de ces sept heures d'avion –et avant une fin aussi invraisemblable qu'attendue--, les retours en arrière sont donc nombreux, et des personnages annexes meublent l'histoire: quelques passagers (dont une petite fille), le chef des stewards, la mère de Julie (Clémentine Célarié) et le meilleur copain d'Antoine (Jonathan Cohen), qu'ils ont tous les deux au téléphone pendant le vol.
C'est le premier film du réalisateur, c'est aussi la première comédie romantique pour Ludivine Sagnier, et son grand retour à l'écran après deux ans d'absence. Elle oppose charme et caractère à un Nicolas Bedos dont c'est le premier rôle important, après des apparitions dans L'AMOUR DURE TROIS ANS et POPULAIRE.
En plus de faire l'acteur, l'humoriste et homme de théâtre et chroniqueur télé a participé ici à l'écriture du scénario, ouvrant la voie pour son personnage à l'image personnelle qu'il donne en public: ''j'ai eu envie d'y injecter un peu de mon histoire, car la structure le permettait'', avoue-t-il. Il s'est donc amusé à ''intégrer à ce film la problématique du type qui s'est collé une épouvantable réputation de coureur de jupons et qui va devoir prouver à celle qu'il aime enfin qu'elle peut lui faire confiance. Ici, Antoine est avocat. Mais si on le remplace par un dramaturge, c'est peu ou prou ma vie! Et le récit est truffé d'anecdotes personnelles''.
Ceux (et celles) qui ne supportent pas Nicolas Bedos n'aimeront donc pas le film, les autres tomberont sous le charme. Et le film lui-même, bluette à la française, ne manque pas de saveur et de savoir-faire, avec des enchaînements entre scènes d'avion et scènes de souvenirs particulièrement réussis.
Le générique de début –New York, une musique jazzy, les jolies jambes de Ludivine Sagnier en nuisette allongée sur son lit et sortant du sommeil-- donne le ton de cette agréable comédie. Et, parmi d'autres, la scène du premier baiser entre Antoine et Julie, sur un pont de Paris, est une petite merveille de réalisation.
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
''Je ne suis pas alcoolique, je suis juste bon vivant'' (Nicolas Bedos à Ludivine Sagnier, qui remarque qu'il abuse des gin-tonic).
(France, 1h36)
Réalisation: Alexandre Castagnetti
Avec Ludivine Sagnier, Nicolas Bedos, Jonathan Cohen
(Sortie le 3 avril 2013)