DILILI À PARIS

Dessin animé de bonnes intentions

Dilili, la petite fille kanake, mène l'enquête dans le Paris de la Belle Époque (©Nord-Ouest Films/Mars Distribution).
Dilili, la petite fille kanake, mène l'enquête dans le Paris de la Belle Époque (©Nord-Ouest Films/Mars Distribution).

C'est un joli plaidoyer féministe et antiraciste, un beau cours d'histoire, et un récit à suspense. N'attendez pas les vacances de la Toussaint pour emmener vos grands enfants voir DILILI À PARIS, le nouveau dessin animé de Michel Ocelot, le réalisateur des KIRIKOU, qui sort sur les écrans ce mercredi 10 octobre.

Dans le Paris de la Belle Époque, la petite Dilili, métisse kanake hébergée chez une comtesse, fait la connaissance d'Orel, un jeune et beau livreur en triporteur, qui lui propose de lui faire visiter la capitale et de rencontrer des hommes et femmes célèbres. Dilili accepte avec joie et, munie de son petit carnet de notes et vêtue de sa plus jolie robe blanche, part avec Orel à la découverte des monuments et des quartiers parisiens.

Mais la balade touristique va se transformer en enquête car, depuis quelques jours, des petites filles sont enlevées aux quatre coins de la ville par une secte de méchants individus, les Mâles-Maîtres, cachés sous terre. Avec l'aide d'Orel et de son amie la cantatrice Emma Calvé, Dilili va accumuler les indices et suivre la piste des kidnappeurs, sans imaginer ce qu'elle va découvrir…

C'est le 8e long-métrage d'animation de Michel Ocelot, 74 ans, qui s'était fait connaître en 1998 avec KIRIKOU ET LA SORCIÈRE. "Autodidacte, il a consacré toute sa carrière au cinéma d’animation. Depuis le début, il écrit ses propres histoires, dessine lui-même les personnages de ses films et crée leur univers graphique", peut-on lire dans sa biographie sur son site personnel.

Le graphisme du dessin animé est caractéristique de ses précédents films, l'animation est un peu saccadée et les personnages ont des traits nets et sans fioritures. Mais la grande nouveauté –très réussie– tient dans le fait que la plupart des décors sont constitués de photos des principaux quartiers et monuments de Paris.

"J’ai photographié Paris pendant quatre ans", explique le réalisateur. "Je visais tantôt les monuments auxquels on ne peut pas échapper (et auxquels je n’ai pas envie d’échapper), tantôt des lieux anonymes que je découvrais au hasard de mes promenades. À la belle saison, je me levais très tôt avec la lumière, avant les Parisiens, pour avoir une ville diurne, mais presque vide. Cela permettait en particulier de limiter le nombre d’éléments à faire disparaître de la photo, les personnes, outre les voitures, les motos, les vélos, les poubelles, et toutes les traces modernes".

Le film a deux aspects: la balade de Dilili et son enquête. Pour la balade, la petite fille découvre les beautés du Paris de la Belle Époque et fait la connaissance des personnalités qu'elle y rencontre, en les saluant à chaque fois d'une révérence et d'un charmant "Je suis heureuse de vous rencontrer". On voit ainsi défiler Renoir, Rodin, Monet, Degas, Camille Claudel, Toulouse-Lautrec, le Douanier Rousseau, Picasso, Colette, Renan, Proust (à voir ici), Gide, Gertrude Stein, Anna de Noailles, Brancusi, Modigliani, Wilde, Ravel, Fauré, Jaurès, Bruant, Louise Michel, Van Dongen, Debussy, Satie, Clemenceau, le Prince de Galles (Edouard VII), Santos-Dumont, Pasteur, Méliès, les frères Lumière, Eiffel, Marie Curie, Sarah Bernhardt, Alphonse Mucha, le clown Chocolat…

Pour l'enquête, le film s'éloigne de la vérité historique et installe un suspense qui se double d'un plaidoyer féministe, quand on découvre que les petites filles enlevées sont réduites en esclavage. Michel Ocelot rend aussi hommage à beaucoup de personnages féminins, dont Louise Michel qui a été, lors de son exil en Nouvelle-Calédonie, l'institutrice de Dilili.

Celle-ci s'exprime dans un français parfait et parle comme un petit livre, avec des réflexions pleines de bon sens et dignes d'un adulte. "Parfois, la vie se révèle tout à fait satisfaisante", conclut la petite fille à la fin de ce joli film humaniste et pédagogique, éloge de la connaissance et de l'enseignement, belle déclaration d'amour à Paris et patchwork de moments très poétiques comme celui où Dilili chevauche un guépard domestique dans l'appartement de Sarah Bernhardt…

Jean-Michel Comte

 

LA PHRASE

"C'est parce que tu n'es pas comme tout le monde qu'on a envie de te connaître" (Orel à Dilili, qui lui fait remarquer qu'elle a le teint plus basané que les autres enfants parisiens).

 

DILILI À PARIS

(France, 1h35)

Réalisation: Michel Ocelot

(Animation)

(Sortie le 10 octobre 2018)