LA COULEUR DE LA VICTOIRE

Jesse Owens, l'athlète qui contraria Hitler aux Jeux de Berlin en 1936

Stephan James interprète Jesse Owens, athlète de légende (1913-1980) (©La Belle Company).
Stephan James interprète Jesse Owens, athlète de légende (1913-1980) (©La Belle Company).

Il y a 80 ans, lors des Jeux olympiques de Berlin, un athlète noir américain gâcha la fête du régime nazi et d'Adolph Hitler en remportant quatre médailles d'or: Jesse Owens. C'est l'histoire de ce sportif hors du commun que raconte le biopic LA COULEUR DE LA VICTOIRE.

Fils d’un paysan pauvre et petit-fils d’esclave, James Cleveland Owens, né à Oakville, dans l’Alabama, s’installe à Cleveland, dans l’Ohio, à l’âge de 9 ans. C'est là qu'il fait ses études et pratique le sport à l'école, au collège, au lycée, jusqu'à ce 25 mai 1935 où, lors de championnats américains à Ann Arbor dans le Michigan, il bat ou égale six records du monde -dont l'un, celui du saut en longueur (8,13m), tiendra pendant 25 ans.

Tenant un champion hors du commun (sprinteur et sauteur en longueur, comme le sera Carl Lewis un demi-siècle plus tard), les États-Unis -où règne le ségrégationnisme et le racisme- comptent bien en faire leur athlète vedette l'année suivante, lors des Jeux olympiques de Berlin. Mais des débats animés agitent les membres du comité national olympique américain sur l'éventualité d'un boycottage de ces Jeux, en raison des persécutions que le régime nazi commence à infliger aux Juifs.

L'un des dirigeants du comité, Avery Brundage (futur président du Comité international olympique de 1952 à 1972), se rend alors à Berlin où les dirigeants allemands, dont le ministre de la Propagande Joseph Goebbels, lui donnent les assurances nécessaires. Les athlètes américains vont donc participer à ces Jeux. Jesse Owens y gagnera quatre médailles d'or: 100m, 200m, 4x100m et saut en longueur. Sous les yeux du chancelier Adolph Hitler qui, pour éviter de lui serrer la main, quittera le stade avant la remise des médailles…

Réalisé avec le soutien de la Jesse Owens Foundation et de la famille d’Owens, le film est entièrement à la gloire de cet athlète d'exception qui eut l'occasion de comparer deux formes de racisme différentes: celui de sa vie de tous les jours aux États-Unis, celui du régime nazi des années 30.

Le film parle un peu de sa vie privée mais est essentiellement basé sur ses exploits sportifs pendant ces quelques années, et sur la relation forte qu'il eut avec son entraîneur blanc, Larry Snyder, joué par Jason Sudeikis. Il ne s'agit donc pas d'un biopic retraçant toute sa vie, car "je ne pense pas qu’on puisse évoquer toute la vie de Jesse Owens dans un film de deux heures", estime le réalisateur, Stephen Hopkins, connu pour PREDATOR-2 en 1991 ou le biopic MOI, PETER SELLERS en 2003, mais aussi pour plusieurs séries télé comme 24 HEURES CHRONO et CALIFORNICATION.

"En se concentrant sur l’époque 1934-36, on comprend l’évolution de ce coureur de talent qui devient champion du monde. La période où il accomplit ses exploits comportait un intérêt dramaturgique majeur: ils n’auraient pas pu se produire plus tôt ou plus tard en raison de certains progrès techniques et de la montée du fascisme en Europe", explique-t-il.

L'acteur canadien Stephan James, qui a joué l'an dernier dans un autre film défendant la cause des Noirs, SELMA, est ici assez convaincant dans le rôle de Jesse Owens, qui a demandé pas mal d'entraînement pour que les scènes de courses soient crédibles.

Le film, de réalisation classique, évoque aussi les rapports fluctuants entre Joseph Goebbels et la réalisatrice Leni Riefenstahl, qui filma ces Jeux de Berlin pour le régime nazi et est décrite ici sous un jour plutôt favorable, loin des débats qu'elle suscita toute sa vie (1902-2003) sur son rôle exact. De même Avery Brundage, interprété par Jeremy Irons, ne prête pas à polémique dans ce film dont le titre original est un jeu de mots pas traduisible en français: RACE, mot qui signifie à la fois race et course.

Jean-Michel Comte

 

LA PHRASE

"Je n'aime pas pisser sur le tapis de mes hôtes. Mais je n'aime pas qu'on me serve du pâté en me disant que c'est du foie gras" (Jeremy Irons, qui dit aux dirigeants allemands qu'il ne veut pas qu'on le prenne pour un imbécile).

 

LA COULEUR DE LA VICTOIRE

("Race") (États-Unis, 1h58)

Réalisation: Stephen Hopkins

Avec Stephan James, Jason Sudeikis, Eli Goree

(Sortie le 27 juillet 2016)